Celles qui aiment la mer, celles qui font semblant de l'aimer. Celles qui d'y dissolvent seules, celles qui y couleront à force de vouloir nager quand une tempête est annoncée. Celles qui ferment les volets avant la venue des typhons. Celles qui veulent y descendre pour éprouver sa souplesse quand elle est d'huile en surface - verte, bleue, teintée de rouge -. Celles qui chaque mois de septembre, remontent au premier étage les meubles du rez-de-chaussée pour leur éviter de tremper - comme l'escalier de la maison - dans les centimètres d'eau qu'apporte cette équinoxe qui ne s'appelle pas marée... mais pourrit les boiseries, auréole le papier peint, s'il y en a, ou les façades.
Celles qui imaginent possible d'entrevoir le rayon vert à Odessa, à Capri, le long d'une côte en Chine. Celles qui nagent chaque soir à la rencontre d'une plaque où fermente de l'argent, du plomb, du mercure blanc repassé par le soleil pour qu'il semble plus brillant.
Celles qui ont grandi ailleurs et celles qui y sont nées, qu'on a posées sur du sable pour leur apprendre à marcher, pour leur éviter de tomber sur de la terre, de l'herbe, des tapis ou du parquet. Celles qui auront appris les sauts périlleux sur la dune, les marelles sans galet à même le cristal brûlé parce qu'il faut se désennuyer où qu'on soit quand on est jeune.
Celles qui l'année du bac entendaient les confidences de leur copine de banc qui était déjà fiancée comme le prouvait sa bague. Au lieu de réviser Marx, Claude Bernard, qui encore .... Fiancé l'enlevait en deuch', ayant déjà le permis - manger des moules sur une digue, arrosé d' un litre de blanc et retour sans accident. Celles qui se conformaient au modèle de leur sœur, de leur cousine, de leur mère qui avait pourtant un métier (institutrice, postière, dactylo tapant les souvenirs d'un capitaine de marine). Etre bronzée dès le mois de mars plutôt que de rester 'speeder' en bibliothèque ou en chambre dans l'espoir de décrocher - allez savoir... une mention? -... Ne peut-on pas "travailler" en séchant entre les plongeons, adossée à cette jetée où si peu de gens circulent parce qu'il n'y a même pas de phare?
Extrait de "La vie des Mollusques dans leur coquillage", 2014.
Celles qui aiment la mer sur des écheveaux de plage